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La profonde réorganisation des réseaux cérébraux dans le coma

 


 

 

 

 

 

 

Actualités scientifiques

La profonde réorganisation des réseaux cérébraux dans le coma

Paris, 29 novembre 2012
6mis à jour le 29/11/2012
Des chercheurs de l'Inserm et du CNRS à l'Université Joseph Fourier de Grenoble, en collaboration avec des chercheurs de l'Université de Cambridge et de Strasbourg, et des cliniciens du CHU de Strasbourg, ont analysé les données de 17 patients dans le coma à partir des données d'IRM fonctionnelle. Ils ont pu mettre en évidence, chez ces patients, une réorganisation des réseaux cérébraux. Ces résultats, parus dans la revue PNAS datée du 26 novembre 2012, pourraient aider les cliniciens dans l'élaboration du diagnostic en cas de coma.
Les chercheurs se sont penchés sur l'analyse des réseaux cérébraux de patients cérébrolésés (non traumatisés) dans le coma, un état où la personne est considérée comme inconsciente.

Les auteurs de l'étude ont employé une méthodologie originale, basée sur la théorie des graphes, des images construites à partir de données d'IRM fonctionnelle au repos et à l'aide de méthodes robustes de traitement statistique du signal. Des index d'efficacité locale et globale des réseaux cérébraux fonctionnels ont été obtenus chez 17 patients cérébrolésés, et chez 20 volontaires sains. Les corrélations de 417 régions cérébrales ont été extraites afin de réaliser les graphes de connexions cérébrales à partir des corrélations statistiquement significatives.
Les chercheurs du CNRS au "GIPSA lab", de l'unité Inserm 836 "Grenoble Institut des neurosciences" et du Behavioural and Clinical Neuroscience Institute à Cambridge, en collaboration avec des cliniciens du CHU de Strasbourg, ont pu mettre en évidence chez les patients cérébrolésés (non traumatisés) dans le coma, une réorganisation des réseaux cérébraux.
Les résultats montrent que la connectivité cérébrale globale est conservée chez les patients dans le coma en comparaison avec les volontaires sains. En analysant la connectivité au niveau local, les auteurs de l'étude ont observé que certaines régions cérébrales fortement connectées (appelées "hubs") chez les volontaires sains, sont plus faiblement connectées chez les patientsdans le coma. Et inversement, des régions moins densément connectées du réseau chez le sujet sain deviennent des "hubs" chez les patients dans le coma.

Représentations cérébrales obtenues à partir des graphes de connectivité

© Sophie Achard - Petra Vertes
La méthode des graphes de connectivité permet de résumer les données acquises par l'IRMf en une seule image. Elle traduit l'efficacité des connexions d'une région par rapport à toutes les autres. Le regroupement des régions les plus connectées entre elles, fait apparaître des modules (représentés chacun par une couleur différente). Patients et volontaires sains présentent tous deux des modules différents dans leur localisation spatiale qui traduisent les profondes altérations dans les connexions cérébrales.
Selon une hypothèse en cours, les troubles de la conscience chez les patients en état de coma persistant seraient liés à des phénomènes de déconnexions entre certaines régions corticales, en particulier le précunéus. Les résultats de ces travaux vont dans ce sens. "La topologie des connexions cérébrales a bien résisté d'un point de vue global au traumatisme en réorganisant les régions les plus connectées du réseau. Il semble donc que le coma puisse être lié à des changements dans la localisation des "hubs" parmi les réseaux cérébraux", suggère Chantal Delon Martin, chargée de recherche à l'Inserm.

L'évaluation des lésions cérébrales et le coma
Le patient peut traverser différents états cliniquement définis lorsqu'il présente des lésions cérébrales: l'état végétatif caractérisé par la préservation du cycle éveil-sommeil (ouverture des yeux spontanée, respiration autonome…) ; l'état de conscience minimale témoignant d'une certaine conscience de l'environnement (capacité de suivre des yeux, réagir à une stimulation) ; le syndrome de verrouillage ("locked in" syndrome) où le patient est paralysé mais conscient (il communique avec les yeux) ; la mort cérébrale lorsque le coma est irréversible (électroencéphalogramme plat, absence de flux sanguin).
Le coma (du grec κῶμα kôma signifiant « sommeil profond ») est un de ces différents états où l'on observe une abolition de la conscience de soi et du monde extérieur, qui survient suite à un accident (cérébral, cardiaque, ...). Il existe deux phases de coma : la phase de coma dite "aigüe" (quelques jours après l'accident) et la phase dite "chronique" (au-delà d'un mois). La réorganisation cérébrale a été observée par les chercheurs lors de la phase "aigüe", lors de laquelle on ne sait pas vers quel type de coma le patient va évoluer.
L'évaluation des lésions cérébrales chez les patients dans le coma se fait actuellement par l'examen clinique, l'IRM morphologique, les potentiels évoqués et par le SPECT (Tomodensitométrie par émission photonique) ou la TEP (Tomographie par émission de positons). "Les résultats de cette étude pourraient aider les cliniciens dans l'élaboration difficile du diagnostic des patients dans le cas de coma car cette méthode permet de caractériser chaque patient individuellement", concluent les chercheurs.


Références :
Hubs of brain functional networks are radically reorganized in comatose patients
S. Achard ∗, C. Delon-Martin †, P. E. Vértes ‡, F. Renard ∗ , M. Schenck §, F. Schneider § , C. Heinrich ¶, S. Kremer ∥, and E. T. Bullmore ‡ ∗∗ ††
∗CNRS, GIPSA-lab, Grenoble, France,
†GIN, INSERM, UJF, Grenoble, France,
‡University of Cambridge, Behavioural & Clinical Neuroscience Institute, Cambridge UK,
§Service de Réanimation Médicale, Hôpital de Hautepierre, CHU de Strasbourg, Université de Strasbourg,
¶LSIIT, Université de Strasbourg,
∥Service de Radiologie 2, Hôpital de Hautepierre, CHU de Strasbourg, Université de Strasbourg,
∗∗Cambridgeshire & Peterborough NHS Foundation Trust, Cambridge, UK, and
††GlaxoSmithKline, Clinical Unit Cambridge, Cambridge, UK

PNAS, 26 novembre 2012
Doi: 10.1073/pnas.1208933109

Contacts :
Contacts chercheurs
Chantal Delon-Martin
Chargée de recherche Inserm
Unité 836 Grenoble Institut des neurosciences "Neuroimagerie fonctionnelle"
Chantal.Delon@ujf-grenoble.fr
+33 (0)4 56 52 06 02

Sophie Achard
Chargée de recherche CNRS
GIPSA - Grenoble Image Parole Signal Automatique
sophie.achard@gipsa-lab.inpg.fr
+44 (0)1223 764 421

Contacts presse
CNRS
Laetitia Louis
presse@cnrs-dir.fr

Inserm
Juliette Hardy
presse@inserm.fr

 

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ADDICTIONS

 

       

 

 

 

 

 

Addictions

Sous titre
Du plaisir à la dépendance

Les addictions sont des pathologies cérébrales définies par une dépendance à une substance ou une activité, avec des conséquences délétères. Les chercheurs tentent de mieux décrire les mécanismes impliqués dans l’apparition, le maintien et les rechutes des addictions. Ils essaient aussi d’identifier les facteurs de vulnérabilité individuels, sociétaux et environnementaux, pour une meilleure prévention et prise en charge.
       

Dossier réalisé en collaboration avec Bertrand Nalpas, Directeur de recherche à l’Inserm et chargé de mission Addiction – Décembre 2014

Comprendre les addictions
Les addictions les plus répandues concernent le tabac (nicotine) et l’alcool. Viennent ensuite le cannabis et, loin derrière, les opiacés (héroïne, morphine), la cocaïne, les amphétamines et dérivés de synthèse. Il existe également des addictions liées à des activités (et non à des substances), comme les jeux d’argent, les jeux vidéo, le sexe ou encore les achats compulsifs.

Des substances plus ou moins addictives souvent testées à l’adolescence
Des dépendances peuvent survenir à tout moment de l’existence, mais la période de 15 à 25 ans est la plus propice à leur émergence. Le comportement à risque des adolescents et des jeunes adultes facilite en effet les premières expériences, et l’usage précoce de drogues expose à un risque accru d’apparition d’une addiction par la suite. Dans l’ensemble, les hommes sont plus souvent concernés par les addictions que les femmes.
Certaines substances semblent avoir un pouvoir addictif supérieur à d’autres compte tenu de la proportion de personnes dépendantes parmi leurs consommateurs. Le produit le plus addictif serait le tabac (32% des consommateurs sont dépendants),  suivi par l’héroïne (23%), la cocaïne (17%) et l’alcool (15%). La vitesse d’installation de la dépendance varie également en fonction des substances. Les dépendances au tabac, à l’héroïne et à la cocaïne peuvent se développer en quelques semaines, alors que celle à l’alcool est beaucoup plus lente.

Part des usagers développant une dépendance à la substance qu'ils consomment.
Valeurs fournies par JC Anthony et coll., Experimental and Clinical Psychopharmacology,1994; 2: 244-268 - © Inserm/Koulikoff, Frédérique
Parmi les jeux vidéo, ceux en réseau sont réputés être les plus addictogènes, particulièrement les jeux de rôle multi-joueurs. Le pouvoir addictif des jeux d’argent n’a quant à lui pas été évalué.

Le cycle infernal des jeux de hasard et d’argent
Les joueurs pathologiques sont en grande majorité des hommes, quadragénaires, souvent pères de famille. Ils pratiquent des jeux de hasard pur (roulette, machines à sous) ou de jeux mêlant hasard et stratégie (paris sportifs, poker, black jack). Le point de départ de leur pathologie est toujours un gain initial qui génère une émotion très positive et les incite à rejouer pour revivre ce moment " magique ". Puis le jeu et le gain s’imposent vite comme une manière de se sentir bien. Mais les pertes successives incitent le joueur à retenter inlassablement sa chance dans l’espoir de "se refaire", en augmentant les mises à mesure que les pertes s’accroissent. Les raisonnements deviennent erronés et vont à l’encontre des lois de probabilité que les joueurs connaissent pourtant généralement bien. Il s’écoule généralement plusieurs années entre le début du jeu et le moment où l’addiction est constituée.
Le pourcentage de joueurs " pathologiques " dans la population générale est estimé à 1%.

Un diagnostic très normé
Le diagnostic de l’addiction (ou dépendance) repose sur des critères bien définis, fixés par des instances internationales de santé mentale et répertoriés dans un manuel, le Diagnostic and Statistical manual of Mental disorders (DSM), dont la cinquième édition date de 2013. Parmi ces critères, on trouve la perte de contrôle de soi, l’interférence de la consommation sur les activités scolaires ou professionnelles, ou encore la poursuite de la consommation malgré la prise de conscience des troubles qu’elle engendre.
Un sujet est considéré comme souffrant d’une addiction quand il présente ou a présenté, au cours des 12 derniers mois, au moins deux des onze critères suivants :
*         Besoin impérieux et irrépressible de consommer la substance ou de jouer (craving)
*         Perte de contrôle sur la quantité et le temps dédié à la prise de substance ou au jeu
*         Beaucoup de temps consacré à la recherche de substances ou au jeu
*         Augmentation de la tolérance au produit addictif
*         Présence d’un syndrome de sevrage, c’est-à-dire de l’ensemble des symptômes provoqués par l’arrêt brutal de la consommation ou du jeu
*         Incapacité de remplir des obligations importantes
*         Usage même lorsqu'il y a un risque physique
*         Problèmes personnels ou sociaux
*         Désir ou efforts persistants pour diminuer les doses ou l’activité
*         Activités réduites au profit de la consommation ou du jeu
*         Poursuite de la consommation malgré les dégâts physiques ou psychologiques
L’addiction est qualifiée de faible si 2 à 3 critères sont satisfaits, modérée pour 4 à 5 critères et sévère pour 6 critères et plus.
Les experts du DSM ne recensent comme addiction que les dépendances aux substances et celle au jeu d’argent. Les usages intensifs de jeux vidéo, de smartphone, l’hyperactivité sexuelle ou professionnelle ne sont pas, à ce jour, considérés comme d’authentiques addictions car on ne dispose pas de données scientifiques convaincantes.

Des conséquences délétères
Lorsqu’elles ne sont pas soignées, les addictions peuvent avoir une issue sévère, voire tragique. Celle-ci peut être directement liée à l’usage excessif de la substance (overdose, coma éthylique) ou provoquée par les effets secondaires à long terme (nombreux cancers associés à la consommation d’alcool et de tabac, troubles neurologiques et psychiatriques des consommateurs réguliers de drogue, contamination par le VIH...).

Une étude coordonnée par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies estime que la conduite sous influence multiplie par 8,5 le risque d’être responsable d’un accident mortel. Si le conducteur a également consommé du cannabis, ce risque est multiplié par 15.
L’usage répété de drogues favorise en outre les troubles psychiques et cognitifs (difficultés de concentration, d’expression ou de mémorisation par exemple) qui peuvent peser sur les résultats scolaires ou professionnels, voire progressivement entrainer une déscolarisation et une marginalisation. A terme, une addiction sévère non soignée aboutit le plus souvent à l’isolement, la désocialisation et la paupérisation.
D’autres conséquences à plus long terme sont encore mal connues, en particulier celles relatives aux effets sur le cerveau de l’alcool et du cannabis consommés au moment de l’adolescence. Pendant cette période (jusqu’à l’âge de 20-25 ans), le cerveau est encore en maturation et paraît plus vulnérable aux effets toxiques. En outre, il a été constaté que plus la consommation est précoce, plus le risque de développer une addiction sur le long terme augmente.


Des mécanismes complexes
L’installation d’une addiction implique au moins trois mécaniques :
*         une augmentation de la motivation à consommer la drogue (recherche de plaisir),
*         un état émotionnel négatif (recherche d’un soulagement),
*         une diminution de la capacité à se contrôler (perte de contrôle de la consommation).
L’addiction démarre essentiellement avec le plaisir généré par la substance addictive. Cette sensation est due à des modifications électrochimiques s’opérant dans le cerveau en réponse à la consommation de la substance. On observe en particulier la libération de dopamine
dopamine
Hormone sécrétée par certains neurones dopaminergiques, impliquée dans le contrôle de la motricité, dans la maladie de Parkinson ou encore les addictions.
, la molécule " du plaisir " et de la récompense, dans le noyau accumbens. L’augmentation de la concentration de dopamine résulte de modifications au niveau des transmissions synaptiques dans différentes aires cérébrales, la substance consommée pouvant interférer avec des neurotransmetteurs
neurotransmetteurs
Petite molécule qui assure la transmission des messages d'un neurone à l'autre, au niveau des synapses.
ou leurs récepteurs..

Le circuit de la récompense occupe un rôle central dans la mise en place et le maintien d’une addiction. Trois systèmes de neurones (dopaminergiques, sérotoninergiques et noradrénergiques) interviennent pour réguler le circuit : le dysfonctionnement de l’un d’entre eux peut générer l'addiction. © Inserm, F. Koulikoff, Fotolia
A cela s’ajoutent d’autres mécanismes, notamment la libération de sérotonine
sérotonine
Un des principaux transmetteurs du système nerveux central.
ou encore l’activation des récepteurs aux endorphines, des molécules endogènes impliquées dans l’antalgie et la sensation de bien-être. En cas de consommation régulière de drogue, la stimulation répétée de ces récepteurs entraîne une diminution de la production naturelle d'endorphines. Dès lors, le plaisir n’est plus obtenu que par l'apport de la substance extérieure, ce qui induit une augmentation de la tolérance à cette substance et un manque dès l'arrêt de sa consommation


Des remaniements cérébraux à long terme
D’autres mécanismes consolident l’addiction. L'organisme devient peu à peu insensible à la substance et à ses effets, le consommateur doit accroître les doses pour obtenir le même niveau de plaisir. La prise répétée de drogue modifie à long terme les réseaux cérébraux et perturbe la recherche du plaisir. Le réseau dopaminergique
dopaminergique
Relatif à la dopamine ou au cellules sécrétant cette hormone.
s’emballe et provoque un besoin incessant de plaisir. D’autres adaptations cérébrales finissent par créer un effet négatif chez le sujet dépendant (dysphorie, anxiété, irritabilité). Cet état émotionnel négatif, avec les sensations désagréables du sevrage, deviendrait alors la motivation principale à consommer (craving de soulagement), au-delà de la recherche d’effets plaisants (craving de récompense).
En outre, les substances addictives modifient la plasticité synaptique c’est à dire la capacité des neurones à se réorganiser entre eux pour intégrer de nouvelles données. Cela semble modifier le souvenir de l’expérience, pour le rendre peut-être plus agréable encore qu’il n’a été, et persistant au cours du temps, incitant à renouveler l’expérience.
Enfin, des stimuli associés de manière répétée à la consommation de drogue (conditionnement), comme un lieu ou un moment de la journée toujours identique, peuvent à terme activer la libération de dopamine avant même la prise de la drogue. C’est ainsi qu’une dépendance psychique peut se créer, par exemple le besoin d’une cigarette au moment du café. Ce phénomène peut expliquer comment des signaux de l’environnement (publicité, bar, odeur d’alcool) peuvent déclencher une rechute même après une longue période d’abstinence.

Des risques individuels et environnementaux à l’addiction
La survenue d’une addiction repose sur trois composantes : l’individu, le produit et l’environnement.
Chaque individu est plus ou moins vulnérable à l’addiction et une part de cette vulnérabilité est d’origine génétique. Elle reposerait sur des associations variées d’altérations affectant de nombreux gènes, chaque modification étant par elle-même inopérante. Parmi ces gènes, certains sont impliqués dans le système dopaminergique. Ainsi, l’allèle A1 du gène du récepteur à la dopamine DRD2 semble constituer, au moins pour certains, un facteur de risque d’addiction via la " recherche d’expériences " au sens large et des comportements impulsifs ou compulsifs.

Ces variations génétiques expliquent aussi en partie la variabilité des effets ressentis par chacun face à une drogue. Des sensations agréables et des effets positifs sur le fonctionnement psychique (désinhibition, oubli des problèmes, amélioration des performances…) sont une incitation à renouveler l’expérience. Une tolérance spontanée élevée avec des effets positifs et modérés est également favorable à l’émergence d’une addiction.
Sur le plan des comportements, les personnes montrant de l’anxiété, un caractère introverti ou encore une tendance dépressive, chez qui les psychotropes (en particulier l’alcool) vont améliorer le fonctionnement psychique, ont un risque accru de dépendance. C’est également le cas chez des personnes avides de sensations fortes.

L’observation par IRM du cerveau de personnes dépendantes montre une hypoactivation des régions corticales frontales et une hyperactivation des régions impliquées dans la motivation, la mémoire, le conditionnement et les émotions. Mais il n’est pas clairement établi si cette dérégulation fonctionnelle est une prédisposition qui précède le développement de l’addiction, ou si elle résulte simplement de la consommation chronique de drogue.
Des facteurs environnementaux sont également impliqués, notamment la disponibilité du produit. Par exemple, le principal facteur de risque de dépendance au tabac est d’avoir grandi au sein d’un foyer de fumeurs, ce qui facilite l’accès au tabac. De même que l’addiction au cannabis est fortement associée au fait d’avoir eu des amis fumeurs au moment de l’adolescence.

Enfin, l’âge de début de consommation joue également un rôle. L’initiation précoce est responsable d’une vulnérabilité accrue. Commencer à consommer de l’alcool au début de l’adolescence multiplie par dix le risque de devenir alcoolo-dépendant à l’âge adulte, par rapport à une initiation plus tardive vers l’âge de 20 ans.

La prise en charge : sevrage et accompagnement
La prise en charge d’une addiction est multidisciplinaire : elle repose le plus souvent sur l’association d’un traitement médicamenteux, d’une prise en charge psychologique individuelle et/ou collective et d’un accompagnement social. Il n’existe pas de " recette " magique. La prise en charge est souvent longue et semée de rechutes. Le succès dépend essentiellement de la motivation du patient à se sevrer, puis de l’amélioration durable de ses conditions de vie et de son estime de lui : trouver un emploi, mener des activités, avoir des centres d’intérêt, trouver un rôle et une utilité dans la vie sociale. Les groupes de parole (Alcooliques Anonymes, Alcool-Assistance, Croix Bleue, Vie libre, Narcotiques anonymes…) ont une grande importance pour parvenir à cela. Ils offrent un soutien majeur, pendant et après le sevrage, grâce aux échanges d’expériences de personnes ayant vécu le même type de parcours.
Par ailleurs, quelques données récentes ont marqué une évolution dans la prise en charge de plusieurs addictions :
*         Pour le sevrage alcoolique, le nalméfène, commercialisé depuis l’été 2014, est une molécule indiquée pour la réduction de la consommation d’alcool. Ce médicament s’inscrit dans la nouvelle politique de " réduction des risques ", stratégie visant à diminuer la consommation d’alcool sans pour autant l’arrêter complètement. Cette politique s’adresse aux consommateurs non-dépendants ou ayant une addiction " faible ". Le baclofène est dans le même registre. Il est toujours en cours d’évaluation via deux études en France (résultats attendus en 2015), mais bénéficie d’une recommandation d’utilisation temporaire (RTU) de la part des autorités de santé.  Il est indiqué à la fois dans l’aide au maintien de l'abstinence après sevrage chez des patients dépendants à l'alcool, et dans la réduction majeure de la consommation d'alcool jusqu'au niveau faible de consommation.
*          
*         Pour le sevrage du cannabis, la thérapie multidimensionnelle familiale impliquant les parents et la fratrie offre de bons résultats pour le sevrage du cannabis chez des jeunes à la dérive.
*          
*         Pour le sevrage tabagique, il semblerait que la cigarette électronique soit au moins aussi efficace que le patch nicotinique.

Les enjeux de la recherche
La recherche dans le domaine des addictions porte sur différentes drogues ou activités addictives, avec plusieurs dimensions : les mécanismes neurobiologiques, les susceptibilités individuelles ou encore les approches thérapeutiques.
Les chercheurs tentent de clarifier de nombreux points : Pourquoi, face à un même produit, certaines personnes deviennent dépendantes et d’autres pas ? Pourquoi l’addiction est-elle si difficilement réversible ? Quelles sont les conséquences à long terme des consommations de substances psychoactives sur le cerveau des adolescents ?
Des équipes s’intéressent aux modifications épigénétiques qui surviennent en réponse à la substance addictive, à l’environnement (stress, traumatismes psychologiques, autres) ou qui ont été héritées. Ces modifications modulent le niveau d’expression de ces gènes et peuvent contribuer à l’apparition d’une addiction.
D’autres équipes testent des approches thérapeutiques innovantes comme la stimulation cérébrale profonde
stimulation cérébrale profonde
Consiste à délivrer un courant électrique de faible intensité dans certaines structures spécifiques du cerveau, grâce à des électrodes directement implantées.
. A Marseille, une équipe utilise des électrodes pour stimuler des neurones du noyau subthalamique impliqué dans la récompense et évaluer les effets sur l’addiction.
Des médicaments sont également à l’étude, en particulier pour le sevrage alcoolique. C’est le cas de l’acide gamma-hydroxybutyrique, déjà utilisé dans certains pays en prévention du syndrome de sevrage et pour le maintien de l'abstinence chez le sujet alcoolo-dépendant.

 

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Troubles obsessionnels compulsifs (TOC)

 

       

 

 

 

 

 

Troubles obsessionnels compulsifs (TOC)

Sous titre
Vers une meilleure prise en charge

Les troubles obsessionnels compulsifs (TOC) sont des comportements répétitifs et irraisonnés mais irrépressibles qui touchent le plus souvent des sujets jeunes, voire des enfants. Des traitements médicamenteux et les thérapies cognitivo-comportementales
thérapies cognitivo-comportementales
Traitement des difficultés du patient dans « l’ici et maintenant » par des exercices pratiques centrés sur les symptômes observables au travers du comportement.

permettent de soulager certains patients. D’autres solutions thérapeutiques, comme la stimulation cérébrale profonde
stimulation cérébrale profonde
Consiste à délivrer un courant électrique de faible intensité dans certaines structures spécifiques du cerveau, grâce à des électrodes directement implantées.

ou la chirurgie dite lésionnelle, sont à l’étude pour les cas les plus sévères. Les progrès en imagerie médicale et le développement de modèles animaux ont permis de mieux comprendre les mécanismes des TOC au cours des dernières années.
       

Comprendre les TOC

Des obsessions irraisonnées et des comportements irrépressibles
Se laver les mains de façon répétée, vérifier sans cesse que la machine à café est bien éteinte ou encore remettre systématiquement les objets à leur place relèvent de ces comportements appelés troubles obsessionnels compulsifs (TOC). Les personnes qui souffrent de TOC sont obsédées par la propreté, l'ordre, la symétrie ou sont envahies de doutes et de peurs irrationnels. Pour réduire leur anxiété, elles effectuent des rituels de rangement, de lavage ou de vérification durant plusieurs heures chaque jour dans les cas graves.
Les obsessions typiques sont la propreté, les germes et la contamination, la peur de commettre des actes d'impulsions violentes ou agressives ou encore le sentiment de se sentir excessivement responsable de la sécurité d'autrui. Il s’agit d’une véritable maladie, très handicapante au quotidien, pouvant même empêcher une vie sociale ou professionnelle normale. La personne perd le sens des priorités, même si elle a conscience que ses obsessions proviennent de sa propre activité mentale.
La maladie touche le plus souvent des sujets jeunes, voire des enfants. La plupart des obsessions et compulsions sont les mêmes que chez les adultes. Chez l’enfant, les compulsions impliquent le plus souvent la famille. Ils peuvent, par exemple, insister pour que leur linge soit lavé de nombreuses fois, vérifier de façon répétée leur travail ou se mettre en colère face au désordre d’autres membres de la famille.

Quelle fréquence parmi la population ?
Les TOC touchent environ 2 % de la population (1). Il s’agit ainsi de la 4e pathologie psychiatrique la plus fréquente après les troubles phobiques, les addictions et les troubles dépressifs. Le début du trouble est le plus souvent précoce et son évolution est chronique : environ 65 % des cas débutent avant l'âge de 25 ans et 15 % après 35 ans. Il peut survenir dès la petite enfance avec une prévalence
prévalence
Nombre de cas enregistrés à un temps T.
allant jusqu’à 3,6 % avant 18 ans (2).

Des mécanismes propres et communs à d’autres maladies psychiatriques
Les progrès en imagerie médicale ou encore le développement de modèles animaux ont permis de mieux comprendre les mécanismes de la maladie au cours des dernières années. Les scientifiques ont identifié plusieurs circuits cérébraux perturbés, notamment les ganglions de la base
ganglions de la base
Zone du cerveau impliquée dans les fonctions motrices, oculomotrices, cognitives et limbiques.
impliqués dans le comportement et la motricité, ou encore le cortex cingulaire antérieur et le cortex orbito-frontal, davantage impliqués dans la gestion des émotions. Les malades présentent une hyperactivité au niveau de ces zones qui pourrait s’expliquer par l’action de certains neuromédiateurs comme la sérotonine
sérotonine
Un des principaux transmetteurs du système nerveux central.
, la dopamine
dopamine
Hormone sécrétée par certains neurones dopaminergiques, impliquée dans le contrôle de la motricité, dans la maladie de Parkinson ou encore les addictions.
ou encore la vasopressine.
Le dysfonctionnement des structures impliquées dans les émotions est retrouvé dans d’autres maladies psychiatriques. Cela pourrait expliquer en partie le fait que la maladie est souvent associée à d’autres troubles psychiatriques : dépression, trouble anxieux ou encore phobie sociale. En revanche, la perturbation des ganglions de la base est spécifique aux troubles obsessionnels compulsifs et pourrait expliquer les problèmes de contrôle de l’action chez ces patients.
Par ailleurs, les études familiales ont montré l’influence de facteurs génétiques dans l’émergence de la maladie, même si leur rôle reste mal défini(1).

Quels traitements pour quels patients ?
En cas d’angoisse et/ou de handicap lié aux troubles, la maladie doit être prise en charge. Les traitements de référence chez l’adulte et l’enfant sont les antidépresseurs (inhibiteurs de recapture de la sérotonine en première intention) et la thérapie cognitivo-comportementale (séances individuelles ou familiales, hebdomadaires ou quotidiennes en fonction de la sévérité) ou l’association des deux. Les antipsychotiques qui ciblent la dopamine peuvent également être utiles. Ces traitements permettent d’améliorer nettement deux tiers des patients et d’en guérir environ 20 % (1).
De nombreux patients restent donc réfractaires à la prise en charge. On parle alors de troubles obsessionnels compulsifs résistants. Pour ces derniers, des techniques chirurgicales ou de stimulation cérébrale peuvent être proposées au cas par cas.

Les enjeux de la recherche

Vers un nouveau mode de prise en charge des TOC résistants
Les traitements médicamenteux actuels ne sont pas satisfaisants pour deux raisons, ils ne ciblent pas des mécanismes spécifiques de la maladie et laissent de nombreux patients en échec thérapeutique. A ce titre, de nouvelles techniques font peu à peu leur chemin.

La chirurgie lésionnelle est pratiquée au cas par cas chez les sujets les plus sévères. Elle consiste actuellement à léser légèrement une zone du cerveau impliquée dans le TOC à l’aide de rayons gamma, sans ouverture de la boîte crânienne. Le taux de réponse varie de 50 % à 67 % mais l’incertitude plane sur le choix des zones à cibler (1). En outre, ces lésions sont irréversibles et la technique est donc éthiquement discutable. Elle pourrait être rapidement abandonnée au profit de la stimulation cérébrale profonde ou la stimulation magnétique transcrânienne qui sont réversibles, et être réservée aux cas exceptionnels de patients justifiant une intervention et présentant une contre-indication à ces dernières techniques.
La stimulation cérébrale profonde est actuellement évaluée chez les patients les plus atteints. Elle a déjà fait ses preuves dans le traitement de la maladie de Parkinson ou encore de l’épilepsie et les complications sont relativement rares. Elle consiste à implanter des électrodes dans le cerveau et à envoyer de façon chronique des impulsions électriques permettant de moduler l’activité de certaines zones impliquées dans la production des comportements. Ces électrodes sont connectées à un neurostimulateur implanté sous la peau et les paramètres de stimulation (fréquence, voltage, durée d’impulsion) sont ajustés par le médecin à l’aide d’un programmateur externe.

Une étude française parue en 2008 (3) montre qu’après trois mois de stimulation, deux tiers des patients répondent au traitement avec la disparition de plus d’un quart des symptômes et le retour à un fonctionnement global satisfaisant. Les auteurs ont par ailleurs constaté que certains dysfonctionnements étaient prédictifs de la réponse à ce traitement (4).
Trois études sont en cours en France pour identifier les meilleures cibles à stimuler, évaluer le bénéfice de cette technique versus placebo
placebo
Médicament composé de substances neutres, sans effet pharmacologique dans la maladie considérée.
ou encore le coût de cette prise en charge par rapport aux coûts de la maladie. Il s’agit des études PRESTOC2, UNIBIL et STOC2. Cette dernière compare la stimulation du striatum ventral ou du noyau sous-thalamique
noyau sous-thalamique
Zone du cerveau associée à la commande des mouvements.
chez une trentaine de patients.
La stimulation magnétique transcrânienne est également en cours d’évaluation. Elle est moins invasive puisqu’elle ne nécessite pas l’implantation d’électrodes et repose sur l’application d’un champ magnétique dirigé vers certaines zones du cerveau impliquées dans la maladie.
Cette technique est utilisée depuis plus de 10 ans dans la dépression et montre des résultats préliminaires positifs dans les TOC. Une étude est en cours chez 40 patients versus placebo pour une durée de trois ans.

Les autres champs de la recherche
Mécanismes de la maladie
La recherche se poursuit pour tenter de clarifier les dysfonctionnements à l’origine de la maladie. Des travaux ont récemment mis en avant l’implication probable de facteurs auto-immuns dans certaines formes précoces de la maladie. Des auto-anticorps seraient dirigés contre les ganglions de la base, siège de la motricité et du comportement, entraînant des dysfonctionnements neuronaux. Ce phénomène serait concomitant à des infections, par exemple à streptocoque chez l’enfant, qui dérégleraient le système immunitaire (5).

Suivi des patients atteints de TOC
Les experts cherchent par ailleurs à mieux connaître le devenir des patients atteints de troubles obsessionnels compulsifs, notamment grâce à des études de cohortes. Une étude longitudinale démarre ainsi dans quatre centres français dont l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris. Cette étude, dite RADAR, permettra de suivre 200 patients pendant trois ans afin de récupérer des données sur l’évolution de la maladie, les facteurs de risque, les comorbidités
comorbidités
Maladie associée à une pathologie principale.
, les complications, les traitements mis en œuvre, etc.

Notes
(1) Haute Autorité de Santé, Rapport 2004 "Troubles obsessionnels compulsifs résistants : prise en charge et place de la neurochirurgie fonctionnelle"
(2) Association AFTOC
(3) Mallet et coll. Subthalamic Nucleus Stimulation in Severe Obsessive Compulsive Disorder. New England Journal of Medicine, Volume 359, Issue 20: November 13, 2008
(4) Welter et coll. Basal ganglia dysfunction in OCD: subthalamic neuronal activity correlates with symptoms severity and predicts high-frequency stimulation efficacy. Translational Psychiatry (2011) 1, e5 (groupe Nature)
(5) Nicholson TR et coll. Prevalence of anti-basal ganglia antibodies in adult obsessive−compulsive disorder: cross-sectional study. Br J Psychiatry. 2012 Jan 26.

 

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ADDICTIONS

 



 

 

 

 

 

Addictions

Sous titre
Du plaisir à la dépendance

Les addictions sont des pathologies cérébrales définies par une dépendance à une substance ou une activité, avec des conséquences délétères. Les chercheurs tentent de mieux décrire les mécanismes impliqués dans l’apparition, le maintien et les rechutes des addictions. Ils essaient aussi d’identifier les facteurs de vulnérabilité individuels, sociétaux et environnementaux, pour une meilleure prévention et prise en charge.
       

Dossier réalisé en collaboration avec Bertrand Nalpas, Directeur de recherche à l’Inserm et chargé de mission Addiction – Décembre 2014

Comprendre les addictions
Les addictions les plus répandues concernent le tabac (nicotine) et l’alcool. Viennent ensuite le cannabis et, loin derrière, les opiacés (héroïne, morphine), la cocaïne, les amphétamines et dérivés de synthèse. Il existe également des addictions liées à des activités (et non à des substances), comme les jeux d’argent, les jeux vidéo, le sexe ou encore les achats compulsifs.
Des substances plus ou moins addictives souvent testées à l’adolescence
Des dépendances peuvent survenir à tout moment de l’existence, mais la période de 15 à 25 ans est la plus propice à leur émergence. Le comportement à risque des adolescents et des jeunes adultes facilite en effet les premières expériences, et l’usage précoce de drogues expose à un risque accru d’apparition d’une addiction par la suite. Dans l’ensemble, les hommes sont plus souvent concernés par les addictions que les femmes.
Certaines substances semblent avoir un pouvoir addictif supérieur à d’autres compte tenu de la proportion de personnes dépendantes parmi leurs consommateurs. Le produit le plus addictif serait le tabac (32% des consommateurs sont dépendants),  suivi par l’héroïne (23%), la cocaïne (17%) et l’alcool (15%). La vitesse d’installation de la dépendance varie également en fonction des substances. Les dépendances au tabac, à l’héroïne et à la cocaïne peuvent se développer en quelques semaines, alors que celle à l’alcool est beaucoup plus lente.

Part des usagers développant une dépendance à la substance qu'ils consomment.
Valeurs fournies par JC Anthony et coll., Experimental and Clinical Psychopharmacology,1994; 2: 244-268 - © Inserm/Koulikoff, Frédérique
Parmi les jeux vidéo, ceux en réseau sont réputés être les plus addictogènes, particulièrement les jeux de rôle multi-joueurs. Le pouvoir addictif des jeux d’argent n’a quant à lui pas été évalué.

Le cycle infernal des jeux de hasard et d’argent
Les joueurs pathologiques sont en grande majorité des hommes, quadragénaires, souvent pères de famille. Ils pratiquent des jeux de hasard pur (roulette, machines à sous) ou de jeux mêlant hasard et stratégie (paris sportifs, poker, black jack). Le point de départ de leur pathologie est toujours un gain initial qui génère une émotion très positive et les incite à rejouer pour revivre ce moment " magique ". Puis le jeu et le gain s’imposent vite comme une manière de se sentir bien. Mais les pertes successives incitent le joueur à retenter inlassablement sa chance dans l’espoir de "se refaire", en augmentant les mises à mesure que les pertes s’accroissent. Les raisonnements deviennent erronés et vont à l’encontre des lois de probabilité que les joueurs connaissent pourtant généralement bien. Il s’écoule généralement plusieurs années entre le début du jeu et le moment où l’addiction est constituée.
Le pourcentage de joueurs " pathologiques " dans la population générale est estimé à 1%.
Un diagnostic très normé
Le diagnostic de l’addiction (ou dépendance) repose sur des critères bien définis, fixés par des instances internationales de santé mentale et répertoriés dans un manuel, le Diagnostic and Statistical manual of Mental disorders (DSM), dont la cinquième édition date de 2013. Parmi ces critères, on trouve la perte de contrôle de soi, l’interférence de la consommation sur les activités scolaires ou professionnelles, ou encore la poursuite de la consommation malgré la prise de conscience des troubles qu’elle engendre.
Un sujet est considéré comme souffrant d’une addiction quand il présente ou a présenté, au cours des 12 derniers mois, au moins deux des onze critères suivants :
*         Besoin impérieux et irrépressible de consommer la substance ou de jouer (craving)
*         Perte de contrôle sur la quantité et le temps dédié à la prise de substance ou au jeu
*         Beaucoup de temps consacré à la recherche de substances ou au jeu
*         Augmentation de la tolérance au produit addictif
*         Présence d’un syndrome de sevrage, c’est-à-dire de l’ensemble des symptômes provoqués par l’arrêt brutal de la consommation ou du jeu
*         Incapacité de remplir des obligations importantes
*         Usage même lorsqu'il y a un risque physique
*         Problèmes personnels ou sociaux
*         Désir ou efforts persistants pour diminuer les doses ou l’activité
*         Activités réduites au profit de la consommation ou du jeu
*         Poursuite de la consommation malgré les dégâts physiques ou psychologiques
L’addiction est qualifiée de faible si 2 à 3 critères sont satisfaits, modérée pour 4 à 5 critères et sévère pour 6 critères et plus.
Les experts du DSM ne recensent comme addiction que les dépendances aux substances et celle au jeu d’argent. Les usages intensifs de jeux vidéo, de smartphone, l’hyperactivité sexuelle ou professionnelle ne sont pas, à ce jour, considérés comme d’authentiques addictions car on ne dispose pas de données scientifiques convaincantes.

Des conséquences délétères
Lorsqu’elles ne sont pas soignées, les addictions peuvent avoir une issue sévère, voire tragique. Celle-ci peut être directement liée à l’usage excessif de la substance (overdose, coma éthylique) ou provoquée par les effets secondaires à long terme (nombreux cancers associés à la consommation d’alcool et de tabac, troubles neurologiques et psychiatriques des consommateurs réguliers de drogue, contamination par le VIH...).

Une étude coordonnée par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies estime que la conduite sous influence multiplie par 8,5 le risque d’être responsable d’un accident mortel. Si le conducteur a également consommé du cannabis, ce risque est multiplié par 15.
L’usage répété de drogues favorise en outre les troubles psychiques et cognitifs (difficultés de concentration, d’expression ou de mémorisation par exemple) qui peuvent peser sur les résultats scolaires ou professionnels, voire progressivement entrainer une déscolarisation et une marginalisation. A terme, une addiction sévère non soignée aboutit le plus souvent à l’isolement, la désocialisation et la paupérisation.
D’autres conséquences à plus long terme sont encore mal connues, en particulier celles relatives aux effets sur le cerveau de l’alcool et du cannabis consommés au moment de l’adolescence. Pendant cette période (jusqu’à l’âge de 20-25 ans), le cerveau est encore en maturation et paraît plus vulnérable aux effets toxiques. En outre, il a été constaté que plus la consommation est précoce, plus le risque de développer une addiction sur le long terme augmente.



Des mécanismes complexes
L’installation d’une addiction implique au moins trois mécaniques :
*         une augmentation de la motivation à consommer la drogue (recherche de plaisir),
*         un état émotionnel négatif (recherche d’un soulagement),
*         une diminution de la capacité à se contrôler (perte de contrôle de la consommation).
L’addiction démarre essentiellement avec le plaisir généré par la substance addictive. Cette sensation est due à des modifications électrochimiques s’opérant dans le cerveau en réponse à la consommation de la substance. On observe en particulier la libération de dopamine
dopamine
Hormone sécrétée par certains neurones dopaminergiques, impliquée dans le contrôle de la motricité, dans la maladie de Parkinson ou encore les addictions.
, la molécule " du plaisir " et de la récompense, dans le noyau accumbens. L’augmentation de la concentration de dopamine résulte de modifications au niveau des transmissions synaptiques dans différentes aires cérébrales, la substance consommée pouvant interférer avec des neurotransmetteurs
neurotransmetteurs
Petite molécule qui assure la transmission des messages d'un neurone à l'autre, au niveau des synapses.
ou leurs récepteurs..

Le circuit de la récompense occupe un rôle central dans la mise en place et le maintien d’une addiction. Trois systèmes de neurones (dopaminergiques, sérotoninergiques et noradrénergiques) interviennent pour réguler le circuit : le dysfonctionnement de l’un d’entre eux peut générer l'addiction. © Inserm, F. Koulikoff, Fotolia
A cela s’ajoutent d’autres mécanismes, notamment la libération de sérotonine
sérotonine
Un des principaux transmetteurs du système nerveux central.
ou encore l’activation des récepteurs aux endorphines, des molécules endogènes impliquées dans l’antalgie et la sensation de bien-être. En cas de consommation régulière de drogue, la stimulation répétée de ces récepteurs entraîne une diminution de la production naturelle d'endorphines. Dès lors, le plaisir n’est plus obtenu que par l'apport de la substance extérieure, ce qui induit une augmentation de la tolérance à cette substance et un manque dès l'arrêt de sa consommation


Des remaniements cérébraux à long terme
D’autres mécanismes consolident l’addiction. L'organisme devient peu à peu insensible à la substance et à ses effets, le consommateur doit accroître les doses pour obtenir le même niveau de plaisir. La prise répétée de drogue modifie à long terme les réseaux cérébraux et perturbe la recherche du plaisir. Le réseau dopaminergique
dopaminergique
Relatif à la dopamine ou au cellules sécrétant cette hormone.
s’emballe et provoque un besoin incessant de plaisir. D’autres adaptations cérébrales finissent par créer un effet négatif chez le sujet dépendant (dysphorie, anxiété, irritabilité). Cet état émotionnel négatif, avec les sensations désagréables du sevrage, deviendrait alors la motivation principale à consommer (craving de soulagement), au-delà de la recherche d’effets plaisants (craving de récompense).

En outre, les substances addictives modifient la plasticité synaptique c’est à dire la capacité des neurones à se réorganiser entre eux pour intégrer de nouvelles données. Cela semble modifier le souvenir de l’expérience, pour le rendre peut-être plus agréable encore qu’il n’a été, et persistant au cours du temps, incitant à renouveler l’expérience.
Enfin, des stimuli associés de manière répétée à la consommation de drogue (conditionnement), comme un lieu ou un moment de la journée toujours identique, peuvent à terme activer la libération de dopamine avant même la prise de la drogue. C’est ainsi qu’une dépendance psychique peut se créer, par exemple le besoin d’une cigarette au moment du café. Ce phénomène peut expliquer comment des signaux de l’environnement (publicité, bar, odeur d’alcool) peuvent déclencher une rechute même après une longue période d’abstinence.

Des risques individuels et environnementaux à l’addiction
La survenue d’une addiction repose sur trois composantes : l’individu, le produit et l’environnement.
Chaque individu est plus ou moins vulnérable à l’addiction et une part de cette vulnérabilité est d’origine génétique. Elle reposerait sur des associations variées d’altérations affectant de nombreux gènes, chaque modification étant par elle-même inopérante. Parmi ces gènes, certains sont impliqués dans le système dopaminergique. Ainsi, l’allèle A1 du gène du récepteur à la dopamine DRD2 semble constituer, au moins pour certains, un facteur de risque d’addiction via la " recherche d’expériences " au sens large et des comportements impulsifs ou compulsifs.
Ces variations génétiques expliquent aussi en partie la variabilité des effets ressentis par chacun face à une drogue. Des sensations agréables et des effets positifs sur le fonctionnement psychique (désinhibition, oubli des problèmes, amélioration des performances…) sont une incitation à renouveler l’expérience. Une tolérance spontanée élevée avec des effets positifs et modérés est également favorable à l’émergence d’une addiction.
Sur le plan des comportements, les personnes montrant de l’anxiété, un caractère introverti ou encore une tendance dépressive, chez qui les psychotropes (en particulier l’alcool) vont améliorer le fonctionnement psychique, ont un risque accru de dépendance. C’est également le cas chez des personnes avides de sensations fortes.   
                                         L’observation par IRM du cerveau de personnes dépendantes montre une hypoactivation des régions corticales frontales et une hyperactivation des régions impliquées dans la motivation, la mémoire, le conditionnement et les émotions. Mais il n’est pas clairement établi si cette dérégulation fonctionnelle est une prédisposition qui précède le développement de l’addiction, ou si elle résulte simplement de la consommation chronique de drogue.
Des facteurs environnementaux sont également impliqués, notamment la disponibilité du produit. Par exemple, le principal facteur de risque de dépendance au tabac est d’avoir grandi au sein d’un foyer de fumeurs, ce qui facilite l’accès au tabac. De même que l’addiction au cannabis est fortement associée au fait d’avoir eu des amis fumeurs au moment de l’adolescence.

Enfin, l’âge de début de consommation joue également un rôle. L’initiation précoce est responsable d’une vulnérabilité accrue. Commencer à consommer de l’alcool au début de l’adolescence multiplie par dix le risque de devenir alcoolo-dépendant à l’âge adulte, par rapport à une initiation plus tardive vers l’âge de 20 ans.

La prise en charge : sevrage et accompagnement
La prise en charge d’une addiction est multidisciplinaire : elle repose le plus souvent sur l’association d’un traitement médicamenteux, d’une prise en charge psychologique individuelle et/ou collective et d’un accompagnement social. Il n’existe pas de " recette " magique. La prise en charge est souvent longue et semée de rechutes. Le succès dépend essentiellement de la motivation du patient à se sevrer, puis de l’amélioration durable de ses conditions de vie et de son estime de lui : trouver un emploi, mener des activités, avoir des centres d’intérêt, trouver un rôle et une utilité dans la vie sociale. Les groupes de parole (Alcooliques Anonymes, Alcool-Assistance, Croix Bleue, Vie libre, Narcotiques anonymes…) ont une grande importance pour parvenir à cela. Ils offrent un soutien majeur, pendant et après le sevrage, grâce aux échanges d’expériences de personnes ayant vécu le même type de parcours.
Par ailleurs, quelques données récentes ont marqué une évolution dans la prise en charge de plusieurs addictions :
*         Pour le sevrage alcoolique, le nalméfène, commercialisé depuis l’été 2014, est une molécule indiquée pour la réduction de la consommation d’alcool. Ce médicament s’inscrit dans la nouvelle politique de " réduction des risques ", stratégie visant à diminuer la consommation d’alcool sans pour autant l’arrêter complètement. Cette politique s’adresse aux consommateurs non-dépendants ou ayant une addiction " faible ". Le baclofène est dans le même registre. Il est toujours en cours d’évaluation via deux études en France (résultats attendus en 2015), mais bénéficie d’une recommandation d’utilisation temporaire (RTU) de la part des autorités de santé.  Il est indiqué à la fois dans l’aide au maintien de l'abstinence après sevrage chez des patients dépendants à l'alcool, et dans la réduction majeure de la consommation d'alcool jusqu'au niveau faible de consommation.
*          
*         Pour le sevrage du cannabis, la thérapie multidimensionnelle familiale impliquant les parents et la fratrie offre de bons résultats pour le sevrage du cannabis chez des jeunes à la dérive.
*          
*         Pour le sevrage tabagique, il semblerait que la cigarette électronique soit au moins aussi efficace que le patch nicotinique.
*
Les enjeux de la recherche
La recherche dans le domaine des addictions porte sur différentes drogues ou activités addictives, avec plusieurs dimensions : les mécanismes neurobiologiques, les susceptibilités individuelles ou encore les approches thérapeutiques.
Les chercheurs tentent de clarifier de nombreux points : Pourquoi, face à un même produit, certaines personnes deviennent dépendantes et d’autres pas ? Pourquoi l’addiction est-elle si difficilement réversible ? Quelles sont les conséquences à long terme des consommations de substances psychoactives sur le cerveau des adolescents ?

Des équipes s’intéressent aux modifications épigénétiques qui surviennent en réponse à la substance addictive, à l’environnement (stress, traumatismes psychologiques, autres) ou qui ont été héritées. Ces modifications modulent le niveau d’expression de ces gènes et peuvent contribuer à l’apparition d’une addiction.
D’autres équipes testent des approches thérapeutiques innovantes comme la stimulation cérébrale profonde
stimulation cérébrale profonde
Consiste à délivrer un courant électrique de faible intensité dans certaines structures spécifiques du cerveau, grâce à des électrodes directement implantées.
. A Marseille, une équipe utilise des électrodes pour stimuler des neurones du noyau subthalamique impliqué dans la récompense et évaluer les effets sur l’addiction.
Des médicaments sont également à l’étude, en particulier pour le sevrage alcoolique. C’est le cas de l’acide gamma-hydroxybutyrique, déjà utilisé dans certains pays en prévention du syndrome de sevrage et pour le maintien de l'abstinence chez le sujet alcoolo-dépendant.

 

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