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Troubles du spectre de l’autisme : où en est la recherche ? |
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Troubles du spectre de l’autisme : où en est la recherche ?
DOSSIER | 16 JUIN 2022 - 8H45 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE)
NEUROSCIENCES, SCIENCES COGNITIVES, NEUROLOGIE, PSYCHIATRIE | SANTÉ PUBLIQUE
Ces dernières années, les progrès des neurosciences et l’identification de facteurs de risque génétiques ou environnementaux ont permis de mieux appréhender les TSA. Crédits : Adobe Stock
Les trouble du spectre de l’autisme (TSA) résultent de particularités du neuro-développement. Ils apparaissent au cours de la petite enfance et persistent à l’âge adulte. Environ 700 000 personnes en France seraient concernées. Il n’existe à l’heure actuelle aucun traitement ciblant de façon spécifique l’autisme, pour améliorer les troubles du comportement ainsi que les altérations des interactions sociales associées. Les personnes peuvent toutefois avoir recours à des traitements pour d’éventuelles comorbidités comme les troubles du sommeil ou l’épilepsie. Dans les laboratoires de recherche, les efforts se poursuivent, non seulement pour identifier de nouvelles options thérapeutiques mais aussi pour améliorer le repérage précoce des TSA et leur prise en charge psychosociale tout au long de la vie.
L’autisme « typique », décrit par le pédopsychiatre Leo Kanner en 1943, est aujourd’hui intégré dans un ensemble plus vaste, celui des « troubles du spectre de l’autisme (TSA) ». Ce terme permet de rendre mieux compte de la diversité des situations. Ces troubles se caractérisent par :
* des altérations des interactions sociales ;
* des problèmes de communication (langage et communication non verbale) ;
* des troubles du comportement : un répertoire d’intérêts et d’activités restreint et répétitif (stéréotypies : tendance à répéter les mêmes gestes, paroles ou comportements) ;
* des réactions sensorielles inhabituelles.
En conséquence, certaines personnes présentent également des difficultés d’apprentissage. Les TSA peuvent également être associés à des comorbidités : troubles anxieux, problèmes de sommeil, déficits de la fonction motrice, épilepsie…
Au sein de cette grande diversité clinique, il est important de relever les « atouts » ou « talents » qui peuvent découler de ce développement cérébral atypique. Le développement de thérapeutiques doit donc cibler ce qui correspond aux plaintes des personnes tout en préservant leurs particularités.
Pour plus de détails lire le dossier de l’Inserm « Autisme » et celui de l’Université de Tours « En savoir plus sur l’autisme »
Ces dernières années, les progrès des neurosciences et l’identification de facteurs de risque génétiques ou environnementaux ont permis de mieux appréhender les TSA, mais leurs causes demeurent encore assez mal comprises. Dans ce contexte, la recherche thérapeutique avance difficilement.
On peut citer l’exemple de plusieurs essais cliniques récemment abandonnés, en raison de résultats jugés peu concluants – alors que les molécules étudiées avaient au départ généré beaucoup d’espoirs.
* La première étude, un essai de phase III contrôlé et randomisé visait à tester l’efficacité d’une molécule appelée balovaptan sur les capacités de socialisation et de communication d’adultes atteints de TSA. Les résultats, publiés dans The Lancet Psychiatry montrent que le traitement n’a pas eu d’effet probant sur ces deux aspects.
* Dans le deuxième cas, des enfants et des adolescents avaient reçu de l’ocytocine par voie intranasale. Dans l’étude publiée dans le New England Journal of Medicine, les résultats suggèrent que ce traitement n’a pas d’impact significatif sur les interactions sociales et le fonctionnement cognitif dans le groupe traité, par rapport au groupe contrôle qui recevait un placebo.
* Un troisième essai clinique portant sur une molécule appelée bumétanide (un antagoniste du transporteur d’ions chlorures NKCC1) n’a pas permis de mettre en évidence d’amélioration du comportement social, seulement une réduction des stéréotypies.
Dès lors, comment faire avancer la science et identifier de nouvelles molécules qui pourraient avoir des effets bénéfiques sur les TSA ? D’autres pistes thérapeutiques sont-elles à l’étude ? Au-delà des essais cliniques, quels sont aujourd’hui les enjeux prioritaires de la recherche dans ce domaine ?
1. Les ions bromures, des résultats prometteurs
Une nouvelle étude, menée par des chercheurs et chercheuses de l’Inserm, du CNRS, de Inrae et de l’université de Tours, publiée très récemment dans le journal Neuropsychopharmacology, apporte des résultats prometteurs sur un médicament qui a beaucoup été utilisé dans le traitement de l’épilepsie : les ions bromures. Avec l’arrivée sur le marché de nouveaux médicaments pour les patients épileptiques, son usage a diminué, mais il s’agit encore d’un outil thérapeutique intéressant, notamment en cas d’épilepsie résistante aux traitements classiques.
L’épilepsie est une comorbidité fréquemment retrouvée chez les personnes atteintes de TSA : il est probable que certains facteurs de risque et processus physiopathologiques soient communs. Les scientifiques ont donc estimé qu’il pouvait être intéressant d’étudier plus particulièrement l’efficacité de ce traitement dans le contexte des TSA.
Inhibition et excitation des neurones
Dans le cerveau, le maintien d’un équilibre entre les phénomènes d’excitation et d’inhibition dans les circuits neuronaux est essentiel à son bon fonctionnement tout au long de la vie. On sait aujourd’hui que les déséquilibres entre excitation et inhibition des neurones sont à l’origine de nombreux troubles, en particulier de l’épilepsie. De même, certaines formes de TSA ont été associées à un dysfonctionnement des connexions neuronales inhibitrices.
Dans le cas de l’épilepsie, les ions bromures contribuent à corriger ce déséquilibre en favorisant l’inhibition, ce qui permet d’éviter les crises. L’hypothèse des scientifiques était donc qu’un effet similaire pouvait être attendu dans les cas de TSA, avec un impact clinique visible sur les comportements sociaux et stéréotypés.
Trois modèles de souris
L’équipe a donc testé ce traitement dans trois modèles précliniques de TSA. À chaque fois, les ions bromures ont eu un effet bénéfique sur le phénotype autistique, restaurant le comportement social et diminuant les comportements stéréotypés des animaux. Les ions bromures ont également permis de réduire leur anxiété.
Les résultats sont d’autant plus prometteurs que les tests ont été menés sur trois modèles de souris qui présentaient différentes mutations génétiques responsables du phénotype autistique.
« Le fait que des effets bénéfiques soient observés dans trois modèles différents permet d’être un peu plus confiant quant à la capacité du traitement à être généralisable à plusieurs sous-groupes d’individus autistes lors de futurs essais cliniques », soulignent Jérôme Becker, chercheur Inserm et Julie Le Merrer, chercheuse CNRS, derniers auteurs de l’étude.
Essai clinique à venir ?
Le projet a reçu un soutien important d’Inserm Transfert et de la cellule de Valorisation c-VALO[1]. Cela a abouti au dépôt de deux brevets, le premier sur la base des effets des ions bromures dans les trois modèles murins étudiés par les chercheurs, complété par un deuxième portant sur l’intérêt de combiner ce traitement avec une molécule facilitatrice de l’activité d’un récepteur à la surface des neurones (le récepteur au glutamate mGlu4), pour obtenir une synergie d’effets.
Toujours sur la base de ces résultats prometteurs, la prochaine étape sera de mettre sur pied un essai clinique sur un petit effectif de patients adultes.
2. D’autres enjeux prioritaires pour la recherche
Néanmoins, la recherche thérapeutique n’est pas le seul défi à relever pour améliorer le quotidien et la qualité de vie des personnes atteintes de TSA.
Identification précoce et interventions individualisées
Une priorité est de continuer à raccourcir les délais entre l’apparition des premiers signes évocateurs d’une trajectoire atypique et la mise en place d’interventions ciblées.
On sait désormais que plus ces signes sont identifiés tôt, dès les premières années de la vie, mieux on est capable d’accompagner et de prendre en charge les enfants et leurs familles. Identifier ces enfants de manière ultra-précoce, en s’intéressant par exemple à leur motricité dès le plus jeune âge ou à leur histoire pré- et périnatale, est à l’heure actuelle un axe de recherche intéressant.
Par ailleurs, continuer à proposer des prises en charge individualisées, reposant sur des équipes multidisciplinaires et sur des interventions dites « comportementales et développementales » comme le programme Denver ou la Thérapie d’échange et de développement (TED) a également un intérêt majeur pour accompagner de manière bénéfique le développement des enfants.
Lire le Grand angle du magazine de l’Inserm n° 45 : Autisme, un trouble aux multiples facettes
Accompagner le vieillissement
Autre défi de taille : la prise en charge des adultes autistes, dans un contexte plus général de vieillissement de la population.
Il existe aujourd’hui une absence de continuum de prise en charge tout au long de la vie. Cependant, depuis plusieurs années, de nombreux programmes de recherche se mettent en place un peu partout dans le monde pour comprendre comment les personnes autistes vieillissent, si elles sont plus à risque de troubles neurodégénératifs et quelles interventions contribuent à augmenter leur qualité de vie et à lutter contre leur isolement social.
On peut également citer l’importance des programmes de réhabilitation psychosociale dédiés aux adultes avec TSA et qui visent notamment à travailler leurs compétences cognitives et à accompagner leur insertion professionnelle et sociale.
L’accès à ces programmes et, de manière plus générale, à la prise en charge, demeure toutefois inégalitaire sur le territoire. Selon les chercheurs, cet enjeu devra être pris en compte aussi bien par les équipes de recherche que par les décideurs publics afin d’offrir les mêmes opportunités et le meilleur accompagnement à toutes les personnes atteintes de TSA, à tous les âges de la vie.
[1] C-VaLo est une expérimentation complémentaire aux SATT régionales qui existe depuis 2019. Il s’agit d’un nouveau dispositif d’investissement public pour accélérer et simplifier le transfert des résultats de la recherche académique. Les membres de C-VaLo sont l’université d’Orléans, l’INSA Centre Val de Loire, le CNRS, l’Inserm, l’INRAE, le BRGM, le CHU de Tours, le Conseil Régional Centre-Val de Loire et l’université de Tours.
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Découverte d’une fonction mémoire de l’immunité innée intestinale |
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Découverte d’une fonction mémoire de l’immunité innée intestinale
COMMUNIQUÉ | 24 FÉVR. 2022 - 20H00 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE)
IMMUNOLOGIE, INFLAMMATION, INFECTIOLOGIE ET MICROBIOLOGIE
Les ILC3 (vert) dans l’intestin (noyau en bleu et actine en rouge) en microscopie à fluorescence. © Nicolas Serafini – Institut Pasteur / Inserm
Le système immunitaire des muqueuses intestinales, et particulièrement l’immunité innée, joue un rôle essentiel dans la régulation des interactions hôte-microbe et notamment dans la protection contre les pathogènes. Des chercheurs de l’Institut Pasteur et de l’Inserm ont montré, grâce à un modèle animal d’infection intestinale, que certaines cellules de l’immunité innée, les cellules lymphoïdes innées de type 3, n’agissaient pas uniquement en phase précoce de l’infection, mais qu’elles pouvaient être entraînées et pourvues d’une forme de mémoire lors d’une réinfection. Cette caractéristique était jusqu’à présent connue pour appartenir principalement aux cellules B et T de l’immunité adaptative. Cette étude est publiée dans Science, le 25 février 2022.
La lutte contre les infections à Escherichia coli responsables de pathologies ou d’hémorragies intestinales représente un enjeu mondial de santé publique. Présentes dans l’eau de boisson ou l’alimentation, ces bactéries peuvent entrainer des diarrhées persistantes, associées à une inflammation intestinale aiguë. On estime qu’elles représentent près de 9% des causes mondiales de décès chez l’enfant.
La muqueuse intestinale est pourvue d’un système défensif complexe lui permettant de lutter contre ce type d’infection, tout en maintenant une tolérance envers le microbiote, indispensable au bon fonctionnement de l’organisme. Cette surveillance constante est assurée par le système immunitaire « inné », qui organise une défense précoce dès les premières heures suivant l’infection. Puis, le système immunitaire adaptatif développe une mémoire envers les pathogènes qu’il rencontre, grâce à l’activation de récepteurs spécifiques exprimés à la surface des lymphocytes B et T, permettant ainsi la production d’anticorps protecteurs et de cytokines inflammatoires.
Contrairement au rôle clairement établi du système adaptatif dans la tolérance et la protection, celui du système inné dans le maintien de cet équilibre demeure encore peu compris.
C’est en 2008[1] que l’équipe du chercheur Inserm James Di Santo (unité d’Immunité innée, Institut Pasteur / Inserm) décrit les cellules lymphoïdes innées de type 3 (« group 3 innate lymphoid cells », ILC3) comme une nouvelle famille de lymphocytes, distincte des lymphocytes T et B. Elles jouent un rôle essentiel dans la mise en place de la réponse immunitaire rapide, notamment dans les muqueuses intestinales, grâce à leur production de cytokines pro-inflammatoires, telles que l’interleukine (IL)-22.
La production de cytokines permet alors d’activer la production par les cellules épithéliales de peptides antimicrobiens, réduisant la charge bactérienne afin de maintenir l’intégrité de la barrière intestinale.
Dans cette étude, les chercheurs de l’unité d’Immunité innée (Institut Pasteur / Inserm) ont montré qu’en utilisant la bactérie intestinale murine, Citrobacter rodentium (un modèle d’infection à E. coli chez l’homme), les ILC3 persistent plusieurs mois après leur activation lors d’une infection. Ils ont appliqué un protocole innovant permettant d’exposer le système immunitaire à des quantités réduites de bactérie C. rodentium. Les scientifiques ont constaté que cette exposition limitée induit des modifications durables de la fonction des ILC3.
Ainsi, lors d’une seconde infection, les ILC3 « expérimentées » permettent un contrôle rapide de l’infection grâce à une prolifération accrue et une production massive d’IL-22.
« Nos travaux montrent que les ILC3 intestinales acquièrent une mémoire pour renforcer dans le temps les défenses de la muqueuse intestinale contre les infections répétées, » explique Nicolas Serafini, premier auteur de l’étude et chercheur Inserm au sein de l’unité d’Immunité innée (Institut Pasteur / Inserm).
« La capacité à « entraîner » le système immunitaire inné au niveau des muqueuses ouvre la voie à l’amélioration de la défense de l’organisme contre une variété d’agents pathogènes qui causent des maladies humaines, » commente James Di Santo, auteur principal de l’étude et responsable de l’unité d’Immunité innée (Institut Pasteur / Inserm).
Cette découverte met en évidence un nouveau mécanisme de défense immunitaire antibactérienne et elle pourrait, à terme, ouvrir de nouvelles approches thérapeutiques contre les pathologies intestinales (MICI ou cancer).
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Le cil primaire, une cible thérapeutique potentielle pour lutter contre les fibroses |
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Le cil primaire, une cible thérapeutique potentielle pour lutter contre les fibroses
PUBLIÉ LE : 06/02/2018
ACTUALITÉ SCIENCE
L’inflammation chronique des tissus est associée à la présence de cellules particulières du tissu conjonctif, les myofibroblastes. Ces derniers conduisent à la formation de fibroses. Des chercheurs de l’Inserm ont identifié un mécanisme crucial pour la formation de ces cellules à partir de cellules souches adipocytaires humaines de tissu adipeux et musculaires. Le cil primaire, à l’origine de la voie de différenciation, pourrait constituer une cible thérapeutique pour lutter contre la fibrose observée dans l’obésité et certaines pathologies musculaires comme la myopathie de Duchenne.
Les myofibroblastes sont des cellules impliquées dans la réparation des tissus. Ils sont notamment mobilisés au niveau des blessures, qu’ils vont contribuer à cicatriser en sécrétant du collagène. Ils possèdent en outre des protéines contractiles, capables de rapprocher les bords d’une plaie. En temps normal, ces cellules disparaissent une fois la blessure cicatrisée. Mais dans certaines conditions pathologiques – comme l’inflammation chronique – ils restent activés et entraînent la formation d’une fibrose.
Ce phénomène n’est pas restreint à la peau : il existe dans de nombreux organes. Ainsi, l’inflammation modérée chronique observée chez les personnes atteintes d’obésité peut déclencher une fibrose dans le tissu adipeux, qui peut elle-même conduire au développement d’une insulino-dépendance. Dans la myopathie de Duchenne, l’inflammation chronique des tissus musculaires provoque un envahissement par les myofibroblastes et la déstructuration du muscle, réduisant peu à peu ses capacités mécaniques. De tels processus fibrotiques peuvent également toucher le foie, le cœur ou les poumons.
L’origine des myofibroblastes qui induisent ces fibroses dépend des tissus concernés. Ils dériveraient des fibroblastes au niveau de la peau, mais des cellules épithéliales dans le rein et les poumons, des cellules mésenchymateuses dans le cœur et des cellules souches adipocytaires dans les tissus adipeux et musculaires. Les processus menant à ces différentes voies de différenciation sont variables et encore mal connus.
Le rôle clé d’un composant mal connu de la cellule
« Nous travaillons depuis longtemps sur les cellules souches adipocytaires, explique Pascal Peraldi* co-auteur du travail publié récemment dans Scientific Reports sur la différenciation des myofibroblastes. Nous avons montré dans un précédent travail que le cil primaire est impliqué dans la différenciation de ces cellules souches en adipocytes. Par ailleurs, d’autres équipes ont identifié des récepteurs du facteur de croissance TGF-b1 sur le cil primaire. Or le TGF-b1 est la principale molécule qui induit la différenciation en myofibroblaste. Nous voulions donc savoir si cette voie TGF-b1 est impliquée dans la différenciation des cellules souches adipocytaires en myofibroblastes et si elle dépend du cil primaire « .
Le cil primaire, l’antenne de nos cellules
Le cil primaire est une organelle qui ressemble à un flagelle unique, une sorte d’antenne, qui existe dans presque tous les types cellulaires. Il permet à la cellule de capter des signaux mécaniques, comme le flot d’urine dans le rein, mais aussi les signaux biochimiques, sous forme de messagers moléculaires, circulant dans son environnement. Une fois ces messagers fixés sur leurs récepteurs présents au niveau du cil, ils activent les voies de signalisation intracellulaires correspondantes.
Encore peu connu, le cil primaire suscite un intérêt croissant notamment pour son implication dans les processus de différenciation et de prolifération cellulaire.
Pascal Peraldi et ses collègues ont étudié, in vitro, le rôle de ce cil dans la différenciation de cellules souches adipocytaires humaines en myofibroblastes. Le cil s’est révélé indispensable au processus de différenciation induit par la présence de TFG-b1. Il s’est montré également nécessaire pour maintenir les myofibroblastes dans un état fonctionnel, c’est-à-dire capables de sécréter du collagène et des protéines contractiles. En effet, la destruction du cil (par adjonction de HPI‑4) entraîne l’arrêt de cette activité.
« Le processus que nous avons ainsi mis en évidence est différent de ce que l’on peut observer dans le rein par exemple, souligne Pascal Peraldi. Dans cet organe, la différenciation en myofibroblaste s’accompagne en effet d’une perte du cil. Ce travail confirme ainsi la diversité des voies de différenciation, en même temps que leur dépendance plus ou moins prononcée au cil primaire ».
Autre apport de ces travaux, la meilleure compréhension des mécanismes à l’œuvre permet d’envisager de manipuler le cil pour moduler les voies de signalisation : ainsi, trouver une molécule capable de détruire de façon très spécifique le cil primaire dans des tissus adipeux ou musculaires pourrait conférer un effet antifibrotique intéressant. « Mais il faut faire très attention : maintenir l’intégrité du cil primaire ailleurs que dans la fibrose est essentiel ! Les maladies associées à un dysfonctionnement de cette organelle, les ciliopathies, en sont la preuve « .
Note
* unité 1091 Inserm/CNRS/Université Nice Sophia Antipolis, équipe Cellules souches et différenciation, Institut de biologie Valrose, Nice.
Source
N. Arrighi et coll. The primary cilium is necessary for the differentiation and the maintenance of human adipose progenitors into myofibroblasts. Scientific Reports 7, Article number : 15248 (2017) doi:10.1038/s41598-017–15649‑2
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Amélioration de la santé de deux nourrissons atteints de formes sévères de syndromes d’hypercroissance dysharmonieuse |
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Amélioration de la santé de deux nourrissons atteints de formes sévères de syndromes d’hypercroissance dysharmonieuse
COMMUNIQUÉ | 26 JANV. 2022 - 16H00 | PAR INSERM (SALLE DE PRESSE)
PHYSIOPATHOLOGIE, MÉTABOLISME, NUTRITION
Les syndromes d’hypercroissance dysharmonieuse sont des maladies génétiques rares associées à une mutation du gène PIK3CA. Depuis 2016, une équipe composée de chercheurs de l’Inserm, de l’AP-HP, d’Université de Paris, à l’Institut Necker-Enfants malades (Unité d’hypercroissance dysharmonieuse et anomalies vasculaires) et des services cliniques des Hospices civils de Lyon a démontré l’efficacité thérapeutique d’une molécule utilisée contre certains cancers, l’Alpelisib, pour traiter un groupe d’enfants et d’adultes présentant des formes sévères de ces maladies. Dans une nouvelle publication, l’équipe rapporte cette fois-ci une amélioration à la fois clinique, biologique et d’imagerie de formes sévères de deux nourrissons atteints de syndromes d’hypercroissance dysharmonieuse traités par Alpelisib. Il s’agit des premières données obtenues concernant le traitement par cette molécule de formes graves néonatales. Les résultats de ce suivi sur un an font l’objet d’une publication dans le Journal of Experimental Medicine (JEM).
Les syndromes d’hypercroissance dysharmonieuse sont des maladies génétiques rares caractérisées par une augmentation de la taille mais aussi du nombre de cellules dans le corps. Ils se manifestent par une asymétrie pouvant toucher n’importe quelle partie ou tissu du corps (graisse, vaisseaux, muscles, os…), y compris le cerveau. Dans 95 % des cas, la maladie est liée à une mutation, lors du développement embryonnaire, du gène PIK3CA, qui régule la prolifération et la croissance des cellules.
Lorsque PIK3CA est trop activé, les parties du corps touchées par la mutation subissent une croissance excessive donnant lieu à des déformations physiques, plus ou moins invalidantes selon le nombre de tissus affectés. La chirurgie et d’autres formes de soins de support permettent d’atténuer certains symptômes, mais il n’existe actuellement aucun traitement médical approuvé pour traiter la maladie.
Dans de précédents travaux, l’Alpelisib, un médicament inhibiteur de PIK3CA récemment autorisé pour traiter certaines formes de cancer du sein[1], a montré des résultats prometteurs, d’abord dans des modèles animaux de syndrome d’hypercroissance, puis chez un petit nombre de patients adultes et enfants. Le médicament fait actuellement l’objet d’une série d’essais cliniques de plus grande envergure mais, jusqu’à présent, il n’existait aucune donnée sur son efficacité chez les nourrissons.
Dans cette nouvelle étude, une équipe de chercheurs de l’Inserm, de l’AP-HP et d’Université de Paris, coordonnée par le professeur Guillaume Canaud, rapporte les résultats encourageants du traitement par Alpelisib administré sur une durée d’un an à deux nourrissons – une fille de 8 mois et un garçon de 9 mois au début du traitement – présentant une variété de symptômes sévères causés par des mutations du gène PIK3CA. Ces symptômes comprenaient des malformations extrêmes des vaisseaux sanguins, une anémie, une croissance excessive asymétrique des membres et des doigts, ainsi que, dans le cas du garçon, une croissance excessive d’un hémisphère cérébral (hémimégalencéphalie) associée à des crises d’épilepsie[2]. Avant le début du traitement, le pronostic vital de la fille était engagé, et le garçon présentait un pronostic neurologique grave, ne répondant pas aux antiépileptiques classiques.
Une bonne tolérance au traitement
Des doses orales quotidiennes de 25 mg d’Alpelisib ont induit chez les deux nourrissons une amélioration clinique rapide et significative des symptômes. Ainsi, 12 mois de traitement ont permis de faire cesser les spasmes épileptiques du garçon et de réduire le nombre de malformations vasculaires de la fille. La diminution considérable du volume de sa jambe droite lui a permis de se tenir debout et de réussir à marcher avec de l’aide. L’anémie s’est corrigée chez les deux enfants dans les suites de l’introduction du traitement.
Les deux enfants présentaient une cassure de leurs courbes de croissance staturo-pondérale (lorsque le poids ou la taille sortent de la courbe indiquant la norme) qui s’est corrigée après introduction de l’Alpelisib. Il est important de noter qu’ils n’ont pas développé d’effets indésirables liés au traitement. Des analyses plus poussées ont révélé qu’à une dose quotidienne de 25 mg, les niveaux d’Alpelisib accumulés dans leur sang étaient beaucoup plus bas que les niveaux tolérés en toute sécurité par les adultes[3].
« Les résultats du traitement par Alpelisib de ces deux nourrissons sont encourageants car ils montrent une amélioration de l’ensemble des paramètres que ce soit cliniques, biologiques ou encore radiologiques. La grande efficacité observée est peut-être liée à l’introduction précoce de l’Alpelisib. En effet, les deux enfants étaient naïfs de toute chirurgie, or nous savons que les remaniements induits par un geste chirurgical peuvent modifier la bonne pénétration de l’Alpelisib dans les tissus. Par ailleurs, il est très probable que la plasticité des tissus à cet âge permette une meilleure efficacité du traitement, explique le professeur Guillaume Canaud, coordinateur de l’étude. Ces résultats doivent toutefois être interprétés avec prudence et devront être confirmés dans le temps et par le biais de nouveaux suivis », nuance-t-il.
Ce traitement par Alpelisib des syndromes d’hypercroissance continue de faire l’objet d’essais cliniques parmi une population composée d’adultes mais aussi d’enfants à partir de 6 ans. Ces résultats encourageants permettent d’envisager une extension d’autorisations pour traiter en clinique les formes graves néonatales.
Le traitement par Alpelisib de ces nourrissons entre dans le cadre d’un protocole d’utilisation compassionnel d’un médicament, qui est une autorisation exceptionnelle délivrée par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé permettant de traiter des patients souffrant de maladies avec un pronostic grave et sans traitement approprié, dans une indication thérapeutique donnée.
[1] Le gène PIK3CA est fréquemment muté dans un certain nombre de cancers. Cette mutation serait retrouvée dans environ 40 % des cancers du sein.
[2] Le garçon était atteint d’un syndrome de West, aussi appelé spasmes infantiles, une forme rare d’épilepsie chez le nourrisson.
[3] Dans le cadre du traitement d’un cancer, la dose quotidienne d’Alpelisib administrée à un adulte est environ 15 fois plus élevée puisqu’elle est comprise entre 300 et 350 mg.
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